Nicolas Salah, PDG de Innelia, Thierry Varlet, directeur général de Innovons 360°, ainsi que Christophe Morin, créateur de la société Packagile, étaient les invités d’Emmanuel Taillardat.

L’espace Conférence du salon ALL4PACK Emballage Paris 2022 a accueilli le 23 novembre un échange intitulé “Ecoconception : soyons facilitateurs des solutions de transition”. Entre réduction de l’impact environnemental et focus particulier sur la conception des produits ainsi que sur leur cycle de vie, les experts ont donné leur définition.

Emmanuel Taillardat a accueilli le 23 novembre Nicolas Salah, PDG de Innelia, Thierry Varlet, directeur général de Innovons 360°, ainsi que Christophe Morin, créateur de la société Packagile, pour débattre autour de cette grande thématique qu’est l’écoconception. Ces experts dans leur domaine sont ainsi venus dépoussiérer cette vaste question de l’écoconception, en nous en livrant leur propre définition, mais en définissant également ses enjeux.

Qu’est-ce que l’écoconception ?

Aujourd’hui un peu nébuleux à appréhender pour le commun des mortels, le terme d’écoconception désigne basiquement la prise en compte de l’impact environnemental dans la conception des produits et de leurs emballages.

Nicolas Salah, PDG de Innelia, et Christophe Morin, créateur de la société Packagile.

D’entrée de jeu, Nicolas Salah parle “de bon sens paysan, d’un peu de méthodologie mais également de la concrétisation des objectifs par des études fonctionnelles”, en poursuivant que cette démarche qui se voulait encore accessoire il y a quelques années devient aujourd’hui une exigence primordiale au sein des cahiers des charges fonctionnels. Et Christophe Morin de confirmer : il est nécessaire pour les entreprises de continuellement mesurer l’empreinte écologique de leurs produits sur l’environnement, mais également de trouver des solutions techniques plus respectueuses de ce dernier, tout en respectant leur cahier des charges.

Thierry Varlet complète cette définition, en arguant de son côté qu’un tel processus se veut systémique, et nécessite pour cela de faire appel à l’intelligence collective en intégrant toutes les parties prenante au processus : les fournisseurs d’emballages et les metteurs en marché comme les collectivités, l’Etat ou les consommateurs eux-mêmes.

L’importance de la synergie et du dialogue

Christophe Morin met également en exergue que ces solutions plus vertueuses sont bien souvent également plus chères à mettre en place, d’où le besoin d’accompagner ces avancées. Or, de gros acteurs économiques, notamment les distributeurs, imposent souvent cette exigence quant à l’écoconception, mais ne donnent pas (ou très peu) d’outils d’action aux autres parties intervenantes au processus, sous prétexte qu’ils sont puissants.

Selon Nicolas Salah, cette approche est surtout castratrice et ne donne que peu d’effets dans la réalité. Thierry Varlet, quant à lui, rappelle que le terme existe depuis 30 ans dans les textes, et qu’en dépit de cela, il est encore énormément instrumentalisé par la grande distribution à des fins de “greenwashing”. Il regrette également que les pouvoirs publics n’aient pas spécialement plus accompagné ce mouvement avec la mise en place de coûts ou de redevances moindres, de taux de TVA préférentiels ou encore même de subventions pour les entreprises recourant à des démarches concrètes d’écoconception, par exemple.

Les voies de l’écoconception

Pour autant, il apparait que l’écoconception n’est pas qu’un doux rêve : Thierry Varlet parle de la priorité de mettre en place un sourcing plus rigoureux des matériaux et la recherche de matériaux plus respectueux de l’environnement et de la vie des consommateurs, comme le nautilium, un biomatériau issu des fonds marins. Il parle également de la nécessaire construction de filières de recyclage adaptées pour le PE ou le PP, qui n’existent pas encore à proprement parler aujourd’hui : l’expert parle d’incohérence et même d’échec concernant ce point, en insistant sur le fait que le secteur n’en serait pas là aujourd’hui si l’initiative avait été prise à la base.

Nicolas Salah, pour sa part, corrobore cette approche, en axant son argumentaire sur la substitution du plastique dans les emballages au profit de matières plus durables comme le carton. L’expert parle également d’écoconception, soit la prise en compte des objectifs produits et l’adaptation au maximum de ces derniers au respect de l’environnement, ce qui demande une réflexion sur la fonctionnalité du produit et une certaine rationalisation des moyens pour y parvenir : par exemple, en passant par un emballage plus coûteux, mais réduit de 80% par rapport à l’emballage de base et plus durable.

Christophe Morin insiste quant à lui sur la nécessité d’augmenter le taux de recyclabilité des emballages, ainsi que d’augmenter le taux de matières issues du recyclage. Il parle également du projet tel que “CharcuPac”, cofinancé par Citeo, qui avait pour objet la mise au point d’une barquette thermoformée en ligne, monomatériau et operculée : un exemple parfait d’écoconception selon Christophe Morin dans le sens où le résultat final respecte aussi bien ses objectifs économiques et industriels que les prérequis environnementaux.

Thierry Varlet, directeur général de Innovons 360°.

Réfléchir aux matériaux pour ensuite réfléchir à une filière de recyclage semble donc être une bonne base pour appréhender la notion d’écoconception : toutefois, les experts insistent sur la difficulté de ce genre de démarches, voire de leur aspect hasardeux car les metteurs en marché, qui sont déjà soumis à la complexité de ce dernier, doivent également jongler d’une part avec des lois et règlements très souvent à côté des réalités, et qui de surcroît, évoluent sans cesse. Et d’autre part, ils doivent aussi faire avec les moyens de traitement des matériaux déjà existants, si tant est qu’ils existent.

Les experts abordent les possibilités offertes par le passage de l’usage unique au réemployable, en mettant tour à tour en garde contre ce qui apparaît comme une panacée, mais qui très souvent peut générer une empreinte carbone forte, du fait notamment des kilomètres parcourus ou des moyens alloués pour réinjecter les emballages à usage uniques dans le système.

La conclusion des experts

Thierry Varlet conclut en disant qu’il est primordial d’oublier l’empreinte carbone de l’emballage, et de penser avant tout à l’empreinte globale du produit une fois emballé car selon lui, “oublier la fonction de l’emballage, c’est oublier le service qu’il rend, d’où la nécessité de se montrer intelligent dans son approche en prenant en compte l’impact de la globalité du produit”.

Nicolas Salah aborde enfin l’importance de ne pas dévoyer ce concept d’écoconception, qui ne peut être mis en place que par une volonté sincère de changement de la part du secteur. “Il n’y a pas de recette miracle, car il ne s’agit que d’un outil, affirme-t-il. Chaque cas aura ses propre solutions dépendamment des objectifs mis en place par les parties prenantes.”


Leave a Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *